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Marseille. Lectures d’Amérique latine au Théâtre Toursky : « L’amour au temps du choléra », Gabriel Garcia Marquez – Marie-Christine Barrault

Pour la première fois à Marseille, un cycle de lectures s’est tenu au Théâtre Toursky à Marseille autour d’une des plus belles littératures du monde : la littérature sud-américaine, à l’initiative du nouveau Consul du Pérou à Marseille, Michel Dossetto, et avec la complicité artistique de Richard Martin.


Marie-Christine Barrault © DR
Marie-Christine Barrault © DR
Pour ce 4e rendez-vous, c’est Marie-Christine Barrault, au timbre de voix et à la qualité de diction inégalables, qui a elle-même choisi ce texte, un de ses livres préférés parmi des milliers… Impossible quoi qu’il en soit de faire l’impasse sur l’auteur colombien, prix Nobel de littérature, père de ce réalisme magique qui nous enchante à longueur d’ouvrages.
Marie-Christine Barrault, à la carrière internationale, est une actrice française née en 1944. Elle a joué jusqu’à ce jour dans plus de cinquante films, quarante téléfilms et quarante pièces de théâtre tout au long de sa carrière, c’est une de nos plus grandes comédiennes.

Nous la découvrons ce soir du 27 avril au Théâtre Toursky en lectrice d’un des plus grands auteurs de notre temps, Gabriel Garcia Marquez. Les mots de Gabriel Garcia Marquez, la voix de Marie-Christine Barrault, les accords de guitare de Marcel Alchech : magie et plaisir conjugués.
Dans la salle intimiste Léo Ferré pleine à craquer, face au public, Marie-Christine Barrault éclaire la scène de son sourire, de ses magnifiques yeux bleus et de sa grâce. Elle s’installe avec, à ses côtés, le guitariste Marcel Alchech, fidèle et délicieux compagnon musical de ces lectures.
Avant que la magie ne commence, Marcel Alchech propose, avec un arrangement sur le Concerto Aranjuez, de découvrir un magnifique instrument, le violon Baryton de la maison Sakellarides à Marseille, lauréat à Malte du dernier grand concours Mondial de la Lutherie.

Dès les premières lignes de Marquez, la salle fond de bonheur sous la voix de la récitante. Et ce seront une heure et demie de charme et plaisir ininterrompus, entre prose et musique. Marie-Christine Barrault projette sa voix, douce, claire, sans la forcer. Les mots précieux de l’auteur en sont ciselés, sertis dans l’écrin lumineux des images qui se profilent, s’esquissent puis apparaissent dans la singulière clarté de leurs couleurs. Marie-Christine Barrault s’attache au rythme, à la musique du texte. Tantôt lascive ou enjouée, la parole devient passion, mélodie, bonheur. Au-delà d’une diction parfaite, l’emploi répété dans le texte de l’imparfait du subjonctif perd toute préciosité et devient, par la bouche de la comédienne, d’une modernité effarante, appuyant la délicatesse du verbe. Non seulement l’amour des protagonistes, mais la prose également sont sublimés. Les personnages, les sentiments du roman de Gabriel Garcia Marquez prennent forme dans toute leur splendeur. De la classe, du grand art !

L’amour au temps du choléra
Publié en 1985, L’amour au temps du choléra est considéré comme l’un des chefs-d’œuvre du Colombien Gabriel Garcia Marquez, lauréat du prix Nobel de Littérature en 1982, romancier, nouvelliste, mais également journaliste et militant politique.
Un roman original d’où émerge un goût intense pour la narration riche, intense, tangible, dans lequel la description des personnes, des couleurs et des odeurs prennent une véritable dimension. Les paroles se transforment en émotions, des émotions chaloupées, sensuelles : la Colombie, le Mexique, la danse des mots et de l’amour.
Márquez donne vie à un livre passionnant et irrésistible, créant une alchimie parfaite entre les mots et le lecteur, au point de ne pouvoir faire autrement que d’en aimer les protagonistes. Mais le protagoniste indiscutable est le sentiment, le vrai, capable de mettre en doute toute certitude. C’est le sentiment qui, d’irréel, devient concret, accompagnant, exactement comme une ombre, la vie de Fermina et Florentino.
Un demi-siècle d'attente, de tourments, de questions. Comme le choléra, l'amour choque la vie à un point tel qu'il change son cours, ses objectifs et ses pensées pour toujours. L'amour décrit par Marquez est physique, évident, passionné. C'est d'abord un sentiment de jeunesse et plus tard, dans la dernière partie du livre, traqué par l'aile de la mort. Entre ces deux pôles, la vie des deux protagonistes se déroule, vécue selon des chemins très différents, lointains les uns des autres, toujours inachevés, le tout décrit avec un style unique: raffiné, passionné.

Un amour sans limites, sans protocoles à suivre, un amour qui défie le temps et vogue pour l’éternité
C’est une histoire d’amour, de courage, d’espoir et d’attente: une attente qui dure un demi-siècle et qui ne se réalise enfin que par la volonté d’un homme qui n’a jamais cessé de se battre pour la seule chose au monde qui ait un sens pour lui, la femme qu’il aime. Malgré tout. Et c’est ainsi que Florentino et Fermina resteront gravés à jamais dans la mémoire des lecteurs et parmi les plus belles pages de la littérature mondiale. Ses mots ont gravé des pages de poésie authentique, où le sentiment, soumis à des tests sévères et démotivants, trouvera le moyen de revenir, car l’attente n’est pas vaine quand il existe des motivations solides imprégnées d’émotions authentiques. Un hymne à l'amour intemporel, au courage de croire qu'en fin de compte, il suffirait de lutter pour obtenir ce que nous désirons ardemment. Et cinquante et un ans, neuf mois et quatre jours, nuits incluses n’est qu’un espace rempli d’espoir.

L'écriture de Marquez est magique : les dialogues sont très peu nombreux. Les événements se déroulent à travers les descriptions, mais quelles descriptions! Les faits, les motivations, les caractéristiques, les descriptions environnementales se recoupent sans cesse, créant un monde, une histoire, des personnages, souvent ponctués d'observations de lumière, et d’ironie. Marquez nous accompagne dans la société composite ex-coloniale, aristocratique avec des noms de famille longs et complexes, ex-esclaves etc. et construit peu à peu son environnement, ses habitudes, ses rites religieux solennels, ses fêtes souvent empreintes de calomnies mélangées à des sourires hypocrites, funérailles, cérémonies solennelles de personnages nobles et influents, de personnes hagardes et pressées, avec une écriture légère, limpide, tout en finesse.

Le public du Théâtre Toursky, ravi, a fait un triomphe aux deux artistes. Le succès de ce cycle de lectures ne peut qu’augurer de sa continuité les saisons suivantes. Merci à Marie-Christine Barrault et à Marcel Alchech, merci aux saltimbanques, merci à Michel Dossetto pour ces moments précieux et surtout merci à Richard Martin, Directeur du Théâtre Toursky, d’offrir ainsi à la culture, saison après saison, ses lettres de noblesse.
Danielle Dufour-Verna

Danielle Dufour-Verna
Mis en ligne le Mercredi 1 Mai 2019 à 17:48 | Lu 287 fois

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