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Un spaghetti-western en ouverture de la saison lyrique monégasque. Par Christian Colombeau

Voici sans doute l'ouvrage le plus méconnu, le plus mal-aimé de Puccini. A tort. Car la Fanciulla del West regorge de trouvailles, d'inventions, d'innovations, de complexités musicales, de richesses harmoniques et mélodiques qui font de cette foisonnante partition une œuvre à part, hélas sous-estimée encore aujourd’hui dans la production d’un compositeur ici à l'apogée de ses moyens, mais à part entière.


La Fille du far-west déboule de Puccini au Grimaldi Forum

© Opéra Monte-Carlo
© Opéra Monte-Carlo
Ecrite pour le Met de New-York, l'orchestration ressemble parfois à du Strauss, certaines harmonies n'auraient pas été reniées par Debussy même. Le livret en béton de Belasco est lui digne d'un mélo des studios Warner. Poussé à l'extrême, voici le vérisme dans toute sa splendeur. La partie de poker du deuxième acte, en fait un grandiose défi à la mort, est aussi haletante que l'affrontement Tosca-Scarpia. Mais cette fois, c'est la Dame qui gagne...
La production romaine, mais très hollywoodienne de Gian-Carlo del Monaco n'accuse pas ses vingt ans d'âge. Assurant mise-en-scène, décors et costumes, le fils de qui vous savez a conçu un western en scope et couleurs, son dolby-stéréo, très réaliste pour donner amour et vie à cette Mascotte du Far-West, égérie des sheriffs, cow-boys, indiens et rangers du Nouveau Monde. On se cogne, boit, chante, danse, entre coups de révolver et cavalcade équestre bien sage pour un émerveillement de tous les instants qui a réjoui, en cette seconde soirée, petits et grands.

La très belle cantatrice Meagan Miller, soprano d’exception, s’est fait une spécialité du rôle de Minnie. Elle en a la jeunesse, la sensibilité, l’énergie indomptable, la bonté inaccessible de cheftaine, la liberté physique, autoritaire, hardie. L’artiste a de plus pénétré au mieux la psychologie de son personnage. Vocalement elle assume sans rire la flopée de si et ut assassins qui parsèment sa partition. Avec en prime cette flamme qui vous emporte dans un tourbillon… de ce que vous voulez…

Son brigand d’amoureux permet à Zoran Todorovitch de retrouver le public monégasque. Sorte de grand enfant perdu, pourchassé, au propre comme au figuré, ardent, vulnérable dans son chant (certains aigus font frémir), ce Jessie James de sous-préfecture reste de bout en bout de la longue soirée plus qu’honorable car malgré tout toujours musical et d’une suprême intelligence.
Admirable de ton, de poids, d’individualité, Alberto Gazale, campe un shérif passionné, hautain, glacial, cynique mais jamais Grand-Guignol, fier de son autorité étoilée, mordant, sincère, et jaloux comme pas deux. Son prétendu suicide final restera hélas plus drôle que dramatique…
Une troupe sympathique de comprimari chanteurs-acteurs anime ce monde d’expatriés, avec ça et là plus ou moins de bonheur. Chœurs de Nice et Monte-Carlo puissants comme jamais.

Tout autant qu’un opéra de chanteurs, La Fanciulla est opéra de Chef. Pinchas Steinberg s’est fait une spécialité de défendre cette partition brillante et complexe. Scrupuleux, ardent, ce vénérable Maestro semble éprouver une joie sensuelle, diabolique, à explorer en détail les méandres de la partition, qu’il mène d’un train d’enfer (et le Philharmonique de Monte-Carlo donc !), comme pour mieux la colorer des attraits du plus somptueux des mélos.

Christian Colombeau
Mis en ligne le Lundi 26 Novembre 2012 à 16:20 | Lu 310 fois

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