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Le Sang des amis, de Jean-Marie Piemme, mise en scène Jean Boillot, du 4 au 29 mai 2011 au théâtre de l'Aquarium, Vincennes

Fresque théâtrale et sonore, Le Sang des amis est une réécriture de Jules César et d’Antoine et Cléopâtre de Shakespeare. Les acteurs relatent comment l’assassinat de Jules César, perpétré au nom de la liberté et de la république, se retourne contre ses auteurs en précipitant la transformation de la République romaine en Empire. Amitié, trahison, course au pouvoir, conflits à répétition, mondialisation…


Le Sang des amis, de Jean-Marie Piemme, mise en scène Jean Boillot, du 4 au 29 mai 2011 au théâtre de l'Aquarium, Vincennes
A travers ce théâtre de reconstitution, c’est précisément l’écho actuel qui est recherché. «Toute guerre civile est d’aujourd’hui», ponctue un personnage.
Servant les trois articulations fortes du propos, aveuglement du politique, absolutisme de ceux qui veulent retourner le monde et réconfort du lien d’amitié, la mise en scène prend la forme d’une ancienne cérémonie, le « mime funéraire » : des acteurs reconstituent la vie et la mort des morts, comme un ultime hommage. Ils seront 7 avec quelques accessoires, et en guise de scénographie, un dispositif sonore (micros, machines sons…) qui créera à la fois un espace pour les corps et du cinéma pour les oreilles. Une façon de « montrer la fabrique de l’Histoire et du politique ».

Le Sang des amis s’inscrit dans une continuité thématique et formelle de mon travail. En 2005, j’ai monté Coriolan qui racontait l’invention du politique et de la République Romaine. Le Sang des amis raconte la fin de la République, épuisée par quatre guerres civiles successives et l’avènement de l’Empire. La forme épique (le mélange de scènes et de récits) qu’emploie Jean-Marie Piemme prolonge mon travail sur le théâtre-récit où on fait primer le narratif sur le dramatique en racontant une histoire avant de la jouer.

J’aime profondément l’écriture de Jean-Marie Piemme parce qu’il écrit adossé à l’Histoire (l’Histoire politique et l’Histoire du théâtre) en s’adressant au spectateur d’aujourd’hui. Avec Le Sang des amis, il vise les générations (la mienne) qui n’ont pas connu la guerre, prises dans l’illusion qu’elle ne les concerne plus. J’habite un pays pacifié. Je connais la guerre « par contumace », par les témoignages, par les films, par la télévision. Dans un monde médiatique qui vise à estomper les contours du réel, les différences, les divisions qui pourtant nourrissent les ressentiments et font le lit de conflits à venir (en témoignent les conflits des banlieues ou le conflit entre communautés en Belgique), le théâtre de Piemme vient nous rappeler que « toute guerre civile est d’aujourd’hui » : la paix est l’exception et la guerre la règle.

Jean-Marie Piemme converse ici avec Brecht et son théâtre épique, en prenant ses distances. D’un « théâtre politique », érigé par le dramaturge allemand pour changer le monde, lui écrit sur les ruines du XXème siècle (la fin des grands récits, l’essoufflement des idéologies) et fait ici un « théâtre du politique », c'est-à-dire un théâtre qui « montre à sa façon ce que dit le politique mais il dit aussi ce que le politique ne peut pas dire » c'est-à-dire, l’impossible, la contradiction, la pulsion, la tragédie. Jean-Marie raconte des fables. Mais il les raconte par une succession d’éclats qui mêlent récits et saynètes, multipliant les points de vue sur le même objet. Jean-Marie et moi partageons un goût pour un théâtre de la reconstitution : polyphonique et éclaté, mélange de sublime et de trivial.

Jean-Marie Piemme avait écrit déjà pour moi (La Vérité) et notre dialogue avait été très fructueux. Dès que j’ai lu Le Sang des Amis, ce fût l’évidence : je monterai ce texte, pour son sujet, pour sa forme et pour le processus de travail qui allait s’en suivre. J’ai appelé Jean-Marie Piemme et nous avons entamé une conversation que nous souhaitions faire durer jusqu’à la première représentation, faisant évoluer sans cesse le texte dans un rapport étroit avec l’écriture de la mise en scène, au contact de toute l’équipe artistique. En particulier du compositeur et du sonographe qui depuis quelques années sont des collaborateurs fondamentaux dans ma recherche d’un alliage entre écriture dramatique et écriture sonore. C’est encore un point commun avec Jean-Marie : nous aimons un théâtre mélangé qui se confronte avec d’autres arts.
Jean Boillot

Pratique

Le Sang des amis de Jean-Marie Piemme, librement inspiré de Shakespeare ( « Jules César » et « Antoine et Cléopâtre ») (Éditions Actes Sud-Papiers)

mise en scène Jean Boillot
dramaturgie Christophe Triau
assistanat à la mise en scène Cécile Arthus
scénographie et costumes Laurence Villerot
compositeur Laurent Sellier
lumière Gildas Plais
sonographie Sébastien Naves
avec
Jean Boillot, Laurent Conoir, Roland Gervet, Philippe Lardaud, Magali Montoya, Julie Pouillon,
Isabelle Ronayette, Assane Timbo

production NEST-CDN de Thionville-Lorraine, Compagnie La Spirale, avec la participation artistique du Jeune Théâtre National, coproduction Théâtre Auditorium de Poitiers-Scène Nationale, Centre des bords de Marne-Le Perreux, Conseil Général du Val-de-Marne, Ville de Poitiers, Théâtre de Corbeil-Essonnes

parution en librairie chez Actes Sud-Papiers le 20 avril 2011 avec La main qui ment et Avaler l'océan.
www.actes-sud.fr

Réservations : par téléphone au 01 43 74 99 61 (service gratuit) du mardi au samedi de 14h à 19h
Théâtre de l'Aquarium | La cartoucherie
route du champ de manoeuvre
75012 Paris

Pierre Aimar
Mis en ligne le Lundi 18 Avril 2011 à 20:54 | Lu 877 fois

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