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Le Diabolus in musica, de Berlioz, ouvre la saison lyrique Niçoise

Descriptions lyriques, plutôt que recherche d’une réécriture dramatique adaptée à la scène : en écrivant La Damnation de Faust, Berlioz était plus proche des tentatives de Lélio ou Roméo que de l’opéra proprement dit.


Pour le Chef et la Mezzo

© D. Jaussein
© D. Jaussein
C’est le propre des grands chefs-d’œuvre que de pourvoir admettre une multitude d’interprétations. La Damnation de Faust présentée ce week-end à l’Opéra de Nice confirme l’éclatante vitalité de cet ouvrage aux ressources infinies, ainsi que son étonnante aptitude à faire jaillir, intérieurement, des images nouvelles.
Monter cette partition tient presque toujours du pari, la Damnation ayant la réputation d’être plus un oratorio scénique qu’un vrai opéra. En effet, délivré des conventions sclérosantes du grand opéra français, c’est en toute liberté que le compositeur isérois a pu laisser errer son imagination. Si toute la première partie est consacrée à la solitude du vieux docteur, l’épisode de Marguerite lui inspirera, sans conteste possible, les plus belles pages. Pages au lyrisme exalté, à l’étonnante sensualité, où la ligne mélodique sinueuse révèle bien les clairs obscurs de l’âme romantique.

Distribuée en quatre parties, la vingtaine de scènes que comprend La Damnation compose une suite de tableaux fort contrastés à la densité d’expression exceptionnelle, Berlioz allant même jusqu’à utiliser une langue inconnue pour son chœur de démons et de damnés à la fin de la course à l’abîme…
Yves Coudray (auteur d’intéressants Manon ou Attila à Marseille) nous a proposé une mise en espace de l’ouvrage. Comme pour tenter en quelque sorte de mettre l’action « entre parenthèses ». Hélas. Impact garanti avec les chœurs (excellents, grandioses, uniques !) relégués en fond du plateau ou dans les loges. Mais, sur une avant-scène aussi vaste qu’un placard à balai, quelques accessoires inutiles, les entrées et sorties, banales, des solistes, les lumières ou projections, peu convaincantes, n’apportaient rien et faisaient même regretter, devant la banalité du propos, la traditionnelle version de concert en rang d’oignons.

Côté vocal on déchante à plusieurs reprises. Deux yankees et une russe pour un ouvrage français, c’est plus que le simple mélomane ne pouvait supporter, les surtitres venant à la rescousse du public.
S’installant dans un confortable à-peu-près, le vétéran Samuel Ramey (soixante-dix ans au prochain muguet) rachète par une présence hors du commun un Méphisto sans empire. Son français est châtié, mais le timbre cotonneux, l’aigu parfois impressionnant, le vibrato à deux vitesses…
Catapulté dans une tessiture qui lui arrache ses plus mauvaises sonorités, empêtré dans un français cosmopolite, Charles Castronovo, partition en main, s’est trompé manifestement de répertoire (l’ut dièse du duo en a fait frémir plus d’un).
Au rideau, une bronca toute méridionale pour le new-yorkais et le kansan. Vox Populi, Vox Dei ?
Avec un Brander de référence (Jean-Marie Frémeau), on le voit, maigre bilan.

C’était sans compter sur Oksana Volkova. Belle à damner tous les saints du paradis, hautement racée, cornélienne, en deux airs tout est dit. Tant de chaleur, tant de noblesse… La tessiture exacte du rôle de Marguerite avec en prime un facteur essentiel : la fragilité.
Autre grand vainqueur de la soirée : Philippe Auguin. A la tête d’un Orchestre de Nice survolté, plein de magie noire, chauffé au fer rouge, le directeur musical de la Maison accomplit un véritable travail d’alchimiste sonore.
Poétique quand il le faut, rigoureux toujours, il entrouvre les portes des enfers avec une rare jubilation pour une fulgurante vision de fin de monde vue comme « en abîme ».
Mention spéciale pour la fameuse Marche Hongroise, aussi célèbre chez Berlioz qu’absente chez Goethe.
Christian Colombeau

Christian Colombeau
Mis en ligne le Samedi 17 Septembre 2011 à 12:07 | Lu 557 fois

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