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Opéra de Nice : « Edgar », de Giacomo PUCCINI (1858-1924). 8/11/24

Une première inoubliable : une production musicale d'exception qui captive par sa beauté et sa profondeur


@ Dominique Jaussein
@ Dominique Jaussein
Le 8 novembre, l’Opéra de Nice créait l’événement avec la présentation « d’Edgar », drame lyrique joué en quatre actes (réduit à 3 depuis) et inspiré du poème dramatique « la coupe et les lèvres » de Musset.

Créée en 1889 à la Scala de Milan, l’œuvre est présentée pour la première fois en France dans sa version originale en quatre actes, offrant une expérience authentique aux spectateurs. Puccini a consacré quatre années à la peaufiner, elle mérite bien plus que l'oubli relatif dans lequel elle a sombré après l'échec de sa première. Le compositeur y révèle déjà toute la richesse de son talent, avec ce don unique pour exprimer l'émotion à travers la musique.

Cet événement s'inscrit dans le cadre du centenaire de la mort de Puccini, avec plusieurs de ses œuvres à l'affiche dans divers lieux.

" La témérité de Bertrand Rossi avec un Edgar inédit" Bertrand Rossi et son équipe ont fait preuve d'une grande audace en montant Edgar. L'Opéra de Nice, convaincu que l'orchestration captivante de Puccini méritait amplement d'être redécouverte, redonne vie à son deuxième opéra en respectant la version initiale du compositeur. Cette attention aux détails, qui rend hommage à l'intention première de Puccini, permet au public de redécouvrir un ouvrage d’une grande beauté injustement oublié. Trois dates sont programmées (8, 10 et 12 novembre).

La production se distingue par un plateau vocal exceptionnel, dirigé avec justesse et passion par Giuliano Carella, tandis que la mise en scène de Nicola Raab, allie esthétique et émotion. La dramaturgie s’en trouve magnifiée.

Giuliano Carella, fait ressortir toutes les subtilités de la partition tout en assurant équilibre entre fosse et scène. Les chœurs sont sublimes et participent au clair obscur de l’œuvre. Il apporte aux intermèdes musicaux le souffle wagnérien nécessaire.

Nicola Raab souligne la complexité des personnages tout en explorant des thèmes universels tels que la quête identitaire et la rédemption, des sujets particulièrement poignants dans le contexte contemporain. La mise en lumière subtile de ces aspects, avec une scénographie épurée mais évocatrice, a permis d'approfondir les enjeux dramatiques tout en offrant une dimension visuelle captivante.

Le requiem du 3ème acte constitue sans conteste un sommet musical de l’ouvrage.

Le cadre : l'histoire se situe dans un village rural médiéval où l'atmosphère sombre et mélancolique reflète les luttes intérieures des personnages. Le décor de Georges Souglides évoque une ambiance avec des éléments typiques de la vie villageoise : un jardin, un amandier en fleurs, une longue table de campagne en bois qui instille une ambiance conviviale, un gigantesque lustre. Une porte d'église et des murs de guingois ajoutent du charme et de l'authenticité à ce paysage. Ensemble, ces éléments créent une toile de fond vivante et évocatrice, nourrissant l'intensité du drame et des émotions des personnages. Ce cadre intime et épique soutient le déploiement poignant de l'histoire, portée par la musique, captivant ainsi les spectateurs.
Le contexte patriotique, avec son atmosphère militaire et la pression d'une communauté villageoise soucieuse de maintenir l'ordre social, accentue les tensions.

Résumé : Dans cet opéra, Edgar se trouve déchiré entre l'amour fidèle de Fidelia et la passion envoûtante de Tigrana. Après un duel avec Franck, il fui le village avec Tigrana en mettant le feu à la maison paternelle. Lassé de sa vie de débauche avec Tigrana, il décide de la quitter et de rejoindre l’armée. Présumé mort au combat, un moine mystérieux révèle qu'Edgar aurait trahi son pays, semant le doute sur sa disparition. Les deux femmes se disputent sa mémoire. Fidelia le défend, tandis que Tigrana, payée pour trahir, le dénigre. Finalement vivant, Edgar réapparaît sous l'identité du moine pour affronter ses erreurs, chercher la rédemption et reconquérir Fidelia qu’il demande en mariage. La tragédie atteint son apogée lorsque Tigrana, folle de rage et ivre de vengeance, poignarde Fidélia. Ne parvenant pas à s’échapper, Tigrana est capturée par les villageois qui exigent qu’elle paie pour son acte…

Les personnages :

Stefano La colla, ténor italien spinto est un Edgar de grande qualité avec des aigus puissants. Force et justesse d’un chant sûr correspondent à son personnage déchiré entre deux femmes radicalement opposées aux prénoms significatifs. Il est parfaitement convaincant scéniquement et apporte douceur à Edgar par instants.
La mezzo-soprano Valentina Boi offre présence scénique et un timbre chaud à une Tigrana séductrice à souhait sur Edgar. Les moyens vocaux sont justes fascinants. La voix est voluptueuse.
La soprano Ekaterina Bakanova triomphe en Fidelia. Le timbre d’une pureté rarissime correspond à cette femme incarnant idéal familial et moral. La voix est saine et offre des pianis diaphanes envoûtants.
Dalibor Jenis est un baryton parfaitement à l’aise scéniquement et vocalement en Franck, frère de Fidélia, lui aussi amoureux de Tigrana et jaloux d’Edgar. Il offre une magnifique leçon de chant dans l’un des rares airs connus encore aujourd’hui de cet opéra.
Feruccio Furlanetto, basse italienne reconnue est un Gualtiéro de grande classe aux moyens vocaux toujours impressionnants. Père de Fidélia et de Franck, il est d’un charisme saisissant.

Accueil triomphal du public niçois mérité
Expérience inoubliable, l'interprétation des artistes, l'intensité de la direction musicale et la profondeur de la mise en scène ont permis de redécouvrir cet ouvrage de jeunesse, révélant toute la richesse émotionnelle et dramatique du compositeur. Une interprétation qui a su transcender l'œuvre, la rendant d'autant plus pertinente et touchante pour le public d'aujourd'hui, et qui, grâce à l'alliance parfaite de la musique, de la mise en scène et des performances vocales, a laissé une empreinte indélébile dans les mémoires de ceux qui ont eu la chance d’y assister.
Leïla METINA-BOUCHOUR : leila.metina@gmail.com

Photos : Dominique Jaussein
Teaser : www.youtube.com/watch?v=uSwy1YoWvrE
Itw de Giuliano Carella : www.youtube.com/watch?v=e-5ZlgbCOAk&t=83s

Distribution

Direction Musicale : Giuliano Carella
Mise en Scène : Nicola Raab
Assistant Mise en scène : Jean-Michel Criqui
Décors et costumes : Georges Souglides
Lumières : Giuseppe Di lorio
Assistant lumières : Manuel Garzetta

Interprètes :
Edgar : Stefano La Colla
Gualtiero père de Fidélia et de Franck : Giovanni Furlanetto
Tigrana : Valentina Boi
Fidélia : Ekatérina Bakanova
Franck (frère de Fidélia) : Dalibor Jenis

Avec la participation de l'Orchestre Philharmonique de Nice et des Choeurs de l'Opéra de Nice, y compris le chœur d'enfants, sous la direction de Giuliano.
Coproduction Opéra Nice Côte d’Azur, Fondazione Teatro Regio de Turin et Opéra National de Lorraine.Trois représentations inédites : les 8,10 et 12 décembre 2024. Durée de 3h00 (en italien et surtitré en anglais et en français).

Serge Alexandre
Mis en ligne le Mardi 26 Novembre 2024 à 13:43 | Lu 239 fois

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