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Stan Douglas, photographies 2008-2013, Carré d'Art - Musée d'art contemporain de Nîmes, exposition du 12 octobre 2013 au 26 janvier 2014

Depuis la fin des années 80, Stan Douglas réalise films, photographies et installations qui réinterrogent certains lieux et événements du passé. Il s’approprie les codes et les techniques existants dans le cinéma, la télévision ou la photographie de presse. Tout son travail est concentré sur les modalités de langage par lesquels le monde nous est rendu accessible.


Cricket Pitch, 1951, 2010
Cricket Pitch, 1951, 2010
Il a exploré les différentes langues idiomatiques, celle des films muets des origines du cinéma (Pursuit, Fear, Catastrophe 1993), celle de la télévision française des années 60 (Hors Champs 1992) ou de la télé américaine (Monodramas, 1992). Ces langages sont souvent dépassés, obsolètes, et il tente de saisir de quelle façon se succèdent les régimes de représentation. Chaque mode de représentation induit une façon de comprendre le monde et sa disparition est forcément symptomatique d’un moment donné. L’espace de représentation est ouvert à une réflexion sociale et politique. Dans une perception critique, en utilisant le médium le plus adapté, il questionne les raisons de l’échec des utopies. Les références à la littérature sont aussi au coeur de son travail. Le théâtre, la poésie, le roman sont des médiums privilégiés pour établir une relation au monde. Il est le commissaire en 1988 de l’exposition itinérante Samuel Beckett : Teleplays ; son film Der Sandmann fait écho au texte de E.T.A. Hoffmann qui avait été relu par Freud en 1919 dans L’inquiétante étrangeté

L’exposition à Carré d’Art est consacrée aux différentes séries de photographies produites entre 2008 et 2013. Dans la continuité de ses recherches il y est question de photojournalisme, de la rhétorique du reportage, de fiction documentaire, des médias mais aussi du devenir spectacle de l’information. Si les images sont très souvent séduisantes, elles sont toujours associées à un réseau de références historiques, dans une prise en compte de leur contexte d’émergence et de leur apparition dans l’espace public. Les photographies plus anciennes de Stan Douglas étaient réalisées dans un style quasi documentaire et souvent associées à ses films comme les images des ruines urbaines de Detroit en 1999 ou les vues des bâtiments historiques de Cuba dans le film Inconsolable Memories ou les photographies Cuba Photographs. Si ces séries pouvaient être pensées comme des ensembles d’images permettant l’élaboration des films à partir de 2008, avec Crowds and Riots elles deviennent des photographies complètement rejouées. Toutes les images sont éminemment construites et deviennent des réinterprétations à partir de sources existantes. Elles ne représentent pas tant notre rapport au monde qu’elles ne donnent la possibilité de faire l’expérience de différentes modalités de langages par lesquels le monde nous est rendu visible.

Bien que d’une autre génération que Ian Wallace ou Jeff Wall, Stan Douglas fait partie de ce qu’on a appelé l’Ecole de Vancouver avec Ken Lum ou Rodney Graham pour qui l’image est résolument en relation avec une réalité sociale et politique, laissant de coté l’autonomie de l’art des pratiques formalistes. Ces artistes ont un goût commun pour la réalité urbaine et en particulier celle de Vancouver.

Dans la série Crowds and Riots, il explore la représentation d’évènements publics ayant eu lieu à Vancouver. Les photographies ont une dimension quasi cinématique et performative. Elles sont réalisées avec les moyens techniques de la production cinématographique et l’utilisation du montage numérique. Une des images les plus emblématiques rejoue la confrontation violente en 1971 entre la police municipale et des manifestants de la contre-culture qui manifestaient pacifiquement. Cette série par la représentation de foules anonymes révèle les tensions présentes dans les rapports de classes, l’aspiration à de nouvelles formes de vie publique et culturelle qui restent contestées par les pouvoirs en place

Dans Midcentury Studio, Stan Douglas prend pour sujet les images de l’Amérique du Nord d’après guerre par l’intermédiaire de la figure d’un photojournaliste ayant travaillé entre 1945 et 1951. C’est la recréation d’un moment historique particulier avec une référence à l’optimisme de l’après-guerre mais aussi l’inscription de la photographie dans le champ des médias, du spectacle et du divertissement.

Il y questionne un des paradigmes du photojournalisme qui dans la lignée de Weegee met en avant l’infaillibilité de l’enregistrement photographique et paradoxalement nous amène vers un surplus de réalité. William Henry Fox-Talbot évoquait déjà la magie de la photographie. Dans cette série composée de portraits mais aussi de scènes de genre, on y découvre principalement des thèmes liés aux divertissements, la magie, le sport ou le cirque avec en toile de fond l’émergence d’une sous-culture.

Avec Disco Angola, Stan Douglas a de nouveau recours à la figure d’un photojournaliste qui voyage entre New York et l’Angola dans les années 70. Il y dessine des parallèles entre le New York en pleine dépression des années 70 et les premiers mouvements de libération pour l’indépendance en Angola. Le langage du corps, que ce soit dans la danse ou la capoiera, est central pour exprimer ce désir de liberté. La musique disco est dans les clubs new yorkais un moyen d’échapper à une situation de crise et d’expérimenter une mixité sociale et raciale.

Le retour vers le passé dans l’ensemble de ces séries photographiques est un moyen d’opérer une rupture dans l’immédiateté du présent pour porter un regard critique sur l’histoire. L’exposition permet de développer une réflexion sur les modalités techniques, esthétiques et politiques de la fabrication des images à différentes époques. La « fictionnalisation » complexe de la réalité, par un recours à la mise en scène, y apparaît comme un des moyens les plus pertinents pour appréhender le réel.

Stan Douglas

Stan Douglas est né en 1960 à Vancouver. Il a eu de nombreuses expositions dont récemment au Power Plant à Toronto, à la Staatgalerie de Stuttgart, à La Secession à Vienne et a été présent à trois biennales de Venise et trois Documenta. Il est représenté par les galeries Victoria Miro à Londres et David Zwirner à Londres et New York. Ses oeuvres sont présentes en autres dans les collections Centre Georges Pompidou à Paris, Museum of Modern Art de New York , Tate Gallery de Londres, Vancouver Art Gallery. L’exposition est coproduite avec le Haus der Kunst de Münich (été 2014), le Museu Berardo de Lisbonne (fin 2014), The National Gallery of Ireland (2015), le Wiels de Bruxelles (2015)

Pratique

Carré d’Art–Musée d’art contemporain
Place de la Maison Carrée
30000 Nîmes
Tél : 04 66 76 35 70
info@carreartmusee.com
www.carreartmusee.com


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Pierre Aimar
Mis en ligne le Lundi 30 Septembre 2013 à 05:21 | Lu 392 fois

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