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La douche froide, une exposition des œuvres de Boris Raux, au Musée International de la Parfumerie, Grasse, du 5 décembre 2014 au 30 mars 2015

En écho à l’exposition estivale Bains, Bulles et Beautés, qui a permis aux habitants du Pays de Grasse et à de nombreux touristes du monde entier de découvrir une histoire de l’hygiène du XVIIIe siècle à aujourd’hui, le MIP achève l’année 2014 par une exposition d’art contemporain surprenante.


Yvan – 2012 Tempête de lessive sous cloche en verre et lumière noire
Yvan – 2012 Tempête de lessive sous cloche en verre et lumière noire
Boris Raux, artiste plasticien qui place l’odorat au cœur de son travail, a eu carte blanche pour investir les espaces du musée avec plusieurs créations et proposer un parcours original.
Jouant avec une séduction visuelle assumée mais où l’humour vient subtilement troubler une première vision purement décorative ou trop immédiate, les installations de Boris Raux, qui peuvent atteindre à la monumentalité, offrent au spectateur une expérience olfactive que l’on peut qualifier de totale. Tous les sens sont convoqués pour que le visiteur participe physiquement à l’exploration de ses propres odeurs naturelles mais aussi artificielles. Pour Boris Raux, si l’odeur est un marqueur individuel et personnel, c’est aussi un phénomène de société. Son univers, centré sur l’odorat est celui d’un humaniste. Et, par un jeu d’accumulation, de répétition d’objets courants liés au nettoyage, à la propreté, il organise, avec une efficacité curieuse, au milieu de la banalité et de l’ordre, avec, notamment, une abondance récurrente d’objets « ready made », un chaos final, une individualisation par les odeurs remettant sérieusement en question des poncifs de notre société de consommation.
Cette exposition consacrée à la création contemporaine est une première qui s’inscrit dans la démarche entamée par le Musée International de la Parfumerie dès sa réouverture en 2008 par la constitution d’une collection ambitieuse d’œuvres contemporaines, avec notamment Jean-Michel Othoniel et Gérard Collin-Thiébaut. Je suis donc très heureux, pour ma première exposition depuis mon arrivée en octobre, de pouvoir proposer, cet hiver, le travail de l’artiste plasticien Boris Raux qui élabore, à partir de l’odorat, une œuvre plastique faisant appel à tous nos sens pour une réflexion sur notre individualité et sa position fragile dans notre société.
Olivier Quiquempois
Conservateur du patrimoine, Directeur des Musées de Grasse

BORIS RAUX

« Au fil de mes recherches, j’aborde le champ de l’art à travers un outil plastique peu usité qui présente l’avantage de contours flous puisque volatils : les odeurs. L’art des odeurs joue le jeu subtil des entre-deux : entre présent et passé, entre subjectivité et objectivité, entre intérieur et extérieur, entre le soi et l’autre. En s’infiltrant par le nez, les odeurs nous titillent toujours et même parfois, nous prennent à la gorge. Elles nous poussent à réagir bien souvent malgré nous. Ainsi dévoilés, démasqués, les langues se délient et les esprits s’échauffent. C’est l’occasion de favoriser les points de rencontre. Que ces inflexions aboutissent à redéfinir des lieux communs ou de véritables fractures, elles se construisent toujours sur les bases de nos expériences personnelles et non sur des présupposés conventionnels.

En produisant ce que nous pourrions définir comme des représentations narratives olfactives, mes chroniques olfactives, je m’inscris dans un courant de pensée qui soutient que tout changement dans le réel passe d’abord par un changement dans nos capacités d’imagination ainsi que dans nos représentations. Focaliser sur notre bout du nez bouscule notre point de vue habituel. Approcher ce qui nous entoure par le biais d’une perspective olfactive est donc devenu au fil des années une méthode d’investigation fertile. J’essaie pas à pas, aussi humblement que possible, de mieux comprendre ce qui structure notre quotidien et donc ce qui définit autant nos conditions d’existence que nos possibilités d’actions.
Même si certains grimacent, la focalisation olfactive génère un regard déplacé qui ne se soustrait pas à la présence du corps, des corps biologiques et chimiques. Nos représentations reprennent de la substance et se retrouvent ainsi complexées autour du cellulaire et du moléculaire. Elles y gagnent peut-être en épaisseur et reflètent peut-être plus justement notre présent ?

Ma pratique bute, néanmoins, sur l’impossibilité de rapporter cette quête. Elle se perd dans la trace d’une odeur qui est toujours celle d’un moment déjà passé, d’un corps absent. Même un brin d’humour ne peut compenser cette perte de substantialité inhérente au détachement artistique ainsi qu’aux conditions d’exposition. « Ici et maintenant » dans le champ de l’art, il est bel et bien trop tard mais ce constat réaliste n’oblige pas au cynisme et au désenchantement. Au contraire, ces traces d’«instants d’après » permettent à une pratique de prendre forme et d’alimenter ce qui s’y trouve juxtaposé.
En fin de compte, mon approche est, tout comme l’odeur, celle de l’infiltration dans le sujet qui l’entoure.»

La douche froide

L’exposition, la douche froide, peut se vivre comme une tentative de rencontre avec un corps propre et le propre du corps.
Au fil d’un corpus d’oeuvres protéiformes, nous voilà transposés en explorateur de cette question complexe mais qui nous suit sans cesse: qu’est-ce qui fait corps ?
0scillant de couches en couches, des plus superficielles et communes que peuvent représenter le monde des déodorants bon marché, à des couches plus épidermiques et intimes qui peuvent inciter la confrontation à un corps étranger, il n’est pas question ici de donner des réponses mais plutôt de donner forme à cette question.

Quoiqu’il en soit, nous sommes invités à adopter la posture centrale d’un corps agissant et critique vis à vis de ce qui nous entoure.
Le corps-à-corps devient inévitable.
Corps-à-corps rapproché ou distancié.
Corps-à-corps assumé ou refoulé.
Corps-à-corps avec soi-même ou avec l’autre.
Corps-à-corps social ou isolé.
Corps-à-corps fantasmé ou biologique…

La question du corps s’infiltre partout et particulièrement par le biais d’une de ses caractéristiques les plus évanescentes et d’apparence non corporelle : ses odeurs.

Pratique

Musée international de la Parfumerie.miP
2 boulevard du Jeu-de-Ballon,
06130 Grasse – France
Tél. : +33 (0)4 97 05 58 00
www.museesdegrasse.com

Pierre Aimar
Mis en ligne le Lundi 27 Octobre 2014 à 18:36 | Lu 293 fois

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