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Paris, Musée de l'homme, « Préhistomania ». Exposition jusqu'au au 20 mai 2024

L'exposition Préhistomania - en partenariat avec l’Institut Frobenius pour la recherche en anthropologie culturelle (Francfort-sur-le-Main) - explore les origines de l’humanité à travers les relevés d’art rupestre.


Grands éléphants, autres animaux et hommes peints sur plusieurs couches. Relevé réalisé par Joachim Lutz lors d’une expédition de Leo Frobenius en 1929 au Zimbabwe. © Institut Frobenius, Francfort-sur-le-Main
Grands éléphants, autres animaux et hommes peints sur plusieurs couches. Relevé réalisé par Joachim Lutz lors d’une expédition de Leo Frobenius en 1929 au Zimbabwe. © Institut Frobenius, Francfort-sur-le-Main
Ces peintures sur toile ou papier, reproduisant les œuvres peintes ou gravées sur les parois des abris ou des grottes, ont été réalisées dès le début du XXe siècle lors d’expéditions scientifiques lancées à travers le monde. Élaborées par des artistes sur le terrain, elles ont été très vite exposées dans de prestigieux musées, donnant l’occasion aux plus anciennes traces picturales de faire irruption dans la modernité.

L’art du relevé

Les équipes de Frobenius (en haut : Espagne, 1936 et Égypte, 1935) et de Lhote (en bas : Algérie, 1956) © Institut Frobenius, Francfort-sur-le-Main © MNHN - J.-C. Domenech
Les équipes de Frobenius (en haut : Espagne, 1936 et Égypte, 1935) et de Lhote (en bas : Algérie, 1956) © Institut Frobenius, Francfort-sur-le-Main © MNHN - J.-C. Domenech
Suite à la découverte des premiers sites préhistoriques dans le courant du XIXe siècle, scientifiques, artistes  et toute une partie de la population se passionnent pour ces lieux ornés cachés, traces de nos lointains ancêtres : une véritable préhistomanie se développe au XXe siècle.
Les sites préhistoriques, grottes, abris sous roche, parois extérieures, se parent de splendides peintures et gravures, parfois difficiles d’accès, mais dont la beauté fascine et le sens nous échappe. De cet engouement naitra une nouvelle forme d’expression : le relevé, qui permet de les étudier mais aussi de les faire connaître au monde.

Commence alors une aventure humaine inédite. L’abbé Breuil publie sans relâche les relevés réalisés dans les grottes françaises dévoilant ces trésors insoupçonnés.

Leo Frobenius parcourt le monde accompagné de nombreux artistes des beaux-arts, hommes et femmes, pour garder une trace de ces chefs-d’œuvre passés. Henri Lhote découvre l’incroyable modernité des peintures du Tassili algérien. Tandis que Gérard Bailloud travaille surtout sur les peintures de la région de l’Ennedi, au Tchad. Tous ces relevés sont aujourd’hui conservés dans deux collections : celle de l’Institut Frobenius à Francfort et celle du MNHN  à Paris.
Montrées pour la première fois depuis des décennies, ces œuvres résonnent d’une modernité incomparable. 
Mais l’exposition questionne également la nature de ces relevés : sont-ils des documents scientifiques ? d’archive ?  ou bien des œuvres d’art ? Et pourquoi ne pourraient-ils  pas être tout cela à la fois ? Des pièces d’une grande beauté, à la portée scientifique et historique inégalée. 
Aurélie Clemente-Ruiz, directrice du Musée de l’Homme

Le Musée de l’Homme présente, en partenariat avec l’Institut Frobenius pour la recherche en anthropologie culturelle de Francfort-sur-le-Main, une exposition temporaire consacrée aux relevés d’art rupestre

Bison couché de la grotte d’Altamira (Espagne). Relevé réalisé par Katharina Marr en 1934. © Institut Frobenius, Francfort-sur-le-Main
Bison couché de la grotte d’Altamira (Espagne). Relevé réalisé par Katharina Marr en 1934. © Institut Frobenius, Francfort-sur-le-Main
Le Musée de l’Homme présente, en partenariat avec l’Institut Frobenius pour la recherche en anthropologie culturelle de Francfort-sur-le-Main, une exposition temporaire consacrée aux relevés d’art rupestre.
Ces peintures sur papier reproduisant les œuvres peintes ou gravées sur les parois des grottes ou des abris sous roche, ont été réalisées à partir du début du XXe siècle lors d’expéditions scientifiques lancées, à travers le monde, à la recherche des origines de l’humanité.
Élaborées par des chercheurs et des artistes sur le terrain, elles ont été immédiatement exposées dans de prestigieux musées, faisant surgir les plus anciennes traces picturales dans la modernité. Avec plus de 200 documents et objets, dont une soixantaine de relevés originaux, l’exposition offre un panorama mondial de ces œuvres, raconte les aventures que furent les expéditions, montre quelle source d’inspiration les images relevées devinrent pour les artistes du XXe siècle, et documente les techniques actuelles de transposition et de conservation des peintures rupestres et pariétales.

Un panorama mondial
des premières peintures

Le premier espace de l’exposition présente l’art rupestre du monde entier, à travers une sélection de relevés emblématiques, de très grand format, qui donnent la sensation d’entrer dans les grottes, d’approcher les parois des abris sous roche et d’expérimenter le choc esthétique de leurs découvreurs. Le visiteur est transporté dans le temps et dans l’espace à travers l’Afrique australe, le Tchad, l’Afrique du Nord, la Papouasie et l’Europe. 
Il découvre quelques pièces maîtresses des fabuleuses collections de l’Institut Frobenius de Francfort, mais aussi celles du Musée de l’Homme, notamment les relevés qu’Henri Lhote réalisa dans le Tassili n’Ajjer en Algérie, dans les années 1950 (voir p.12). Ces relevés ont une valeur scientifique et historique inestimable : ils sont souvent les seuls témoins de peintures et gravures rupestres dégradées depuis… et révèlent parfois des paysages disparus depuis des millénaires avec la désertification et autres modifications des conditions environnementales.

L’épopée des expéditions
Ces transpositions de peintures rupestres ont été réalisées au cours d’extraordinaires expéditions internationales, dont celles de l'abbé français Henri Breuil à partir des années 1900, celles de l’Allemand Leo Frobenius dès les années 1910, puis celles de Gérard Bailloud et d’Henri Lhote à partir des années 1950. Véritables aventures, pour certaines, ces missions correspondent aux débuts de l’étude de la Préhistoire à l’échelle mondiale, que les relevés ont largement contribué à faire connaître. Les séries de photographies conservées à l’Institut Frobenius et au Musée de l’Homme, qui documentent ces voyages, permettent de mieux comprendre le travail de ces pionniers… et pionnières, les femmes y étant nombreuses, particulièrement au sein des expéditions Frobenius.

De la grotte au musée
Dès les premières expéditions, les « releveurs » et « releveuses » ont eu l’ambition d’exposer leurs travaux dans des musées. C’est cette aventure artistique que retrace le troisième espace de Préhistomania. Au cours des années 1930, Leo Frobenius présente en effet à Paris deux expositions : la première se tient à la Salle Pleyel en 1930, à l’invitation de l’abbé Breuil ; la seconde, au Musée d’Ethnographie du Trocadéro (futur Musée de l’Homme). 
Les critiques d’art et les artistes découvrent  à cette occasion l’extrême « modernité » de l’art préhistorique, c’est-à-dire ses parentés avec les productions de l’époque. Des parentés que le MoMA, à New York, révélera pleinement, en 1937, en exposant des relevés aux côtés d’œuvres modernes. Cette expérience saisissante est reproduite dans cette partie de l’exposition grâce à des tableaux de Klee, Pollock, Arp et Lam qui viennent dialoguer avec les relevés.

Un patrimoine à préserver
La pratique du relevé est toujours d’actualité dans le travail des préhistoriens. La quatrième partie de l’exposition fait découvrir quelles méthodes sont employées aujourd’hui pour décrypter les figures rupestres et en conserver toutes les informations.
Elle interroge aussi sur la nécessité de faire connaître le patrimoine inestimable que constitue l’art rupestre, et celle de le protéger des dégradations. Pour satisfaire ces deux volontés, parfois contradictoires, les relevés d’hier et ceux d’aujourd’hui s’avèrent, plus  que jamais, être des témoins indispensables.

Admirer sans dégrader
L’exposition Préhistomania offre ainsi  au public l’opportunité de contempler ces extraordinaires réalités préhistoriques sans avoir à se déplacer sur un terrain lointain, arpenter une région à risque, ou craindre de dégrader les originaux.
Elle propose un voyage temporel dans  des paysages transformés depuis, et permet de comprendre quelle fascination ces témoignages ont pu exercer sur ceux qui découvraient tout juste l’incroyable richesse de la Préhistoire sur tous les continents.

Les femmes dans les expéditions Frobenius

© Institut Frobenius, Francfort-sur-le-Main© Institut Frobenius, Francfort-sur-le-Main
© Institut Frobenius, Francfort-sur-le-Main© Institut Frobenius, Francfort-sur-le-Main
C’est l’immense photo d’une femme qui accueille le visiteur à l’entrée de l’exposition. Assise sur une chaise de fortune, pinceau à la main, elle fait face à une grande toile installée dans ce qui ressemble à l’entrée d’une caverne décorée de figures rupestres. Cette femme, c’est Agnes Schulz, la première dessinatrice à avoir travaillé avec Leo Frobenius, dès 1923, après avoir étudié à l’Académie royale de graphisme et de reliure de Leipzig. Jusqu’en 1957, elle réalisa au moins 700 reproductions de peintures rupestres et 450 images ethnographiques, accompagnant l’ethnologue dans ses expéditions en Afrique du Sud et en Libye, avant de partir pour la Scandinavie puis l’Australie.
Or, cette femme n’est pas une exception. Elisabeth Pauli, Maria Weyersberg, Katharina Marr, Elisabeth Mannsfeld… une quinzaine de dessinatrices, photographes et scientifiques participèrent aux expéditions de Leo Frobenius. Issues de la bourgeoisie, elles étaient toutes diplômées ou formées dans des cours privés. Certaines furent, par la suite, largement reconnues pour leurs contributions scientifiques.

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Pierre Aimar
Mis en ligne le Dimanche 14 Janvier 2024 à 23:05 | Lu 213 fois

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