Légendes des mers. L’art de vivre à bord des paquebots, Palais Lumière, Evian du 15 juin au 22 septembre 2013

Après la Première Guerre mondiale, une clientèle fortunée a soif de luxe, de confort, de modernité et de nouveaux horizons.


Byron Company, Hall et grande descente de la 1re classe à bord du paquebot France Cie Gle Transatlantique , vers 1912. Photographie © Collection French Lines
En France, la Compagnie Générale Transatlantique et la Compagnie des Messageries Maritimes lancent sur les mers des paquebots dont les noms et les silhouettes s’inscriront dans la légende : Champollion, Mariette Pacha, Aramis, Paris, Ile-de-France, Normandie…
Désireuses de surprendre et de satisfaire leurs passagers, les deux compagnies demandent à des artistes de renom d’aménager leurs navires : architectes et décorateurs (Pacon, Rulhmann, Leleu, Dominique, Dunand, Lalique...), peintres (Iribe, Dufy, Dupas...), affichistes (Colin, Cassandre, Sandy-Hook...), grandes manufactures françaises (Christofle, Ercuis, Puiforcat, Saint-Louis, Daum, Haviland...) unissent leur créativité et leurs compétences pour que ces palais flottants demeurent inégalables.

A travers un parcours jalonné de projections et de sonorisations, cette exposition témoigne d’un âge d'or où le plaisir faisait partie intégrante du voyage.
Riche de 350 pièces (peintures, dessins, affiches, maquettes, mobilier, costumes, orfèvrerie, menus, ouvrages illustrés, manuscrits, photographies…), elle est réalisée en partenariat avec l’Association French Lines et bénéficie de prêts du Musée des lettres et manuscrits, du Musée d'Art moderne André Malraux - MuMa du Havre et de collectionneurs privés.

Parcours de l'exposition

Pendant près de deux cents ans, les paquebots ont sillonné toutes les mers du globe. Immenses et magnifiques, ils ont incarné les innovations et les conquêtes industrielles, le monde du progrès galopant, ainsi que les fastes de la civilisation occidentale issue du XIXe siècle triomphant. L’exposition, à travers un parcours constitué de trois sections historique des compagnies maritimes, invitation au voyage, art de vivre à bord des paquebots, fait la part belle à deux grandes compagnies : la Transat et les Messageries Maritimes.

La première partie de l'exposition est consacrée à l'historique des compagnies maritimes. Une série de maquettes de la Transat illustrera les évolutions techniques pendant près d’un siècle. Seront également présentés des documents d'archives, tel le décret impérial de Napoléon III qui annonce la création de la Compagnie Générale Transatlantique.

Les pionniers des lignes postales

En 1851, les Messageries Nationales ouvrent en Méditerranée orientale la première ligne postale française gérée par une compagnie privée. Menacés par les progrès du chemin de fer, des entrepreneurs de transport par diligence s'allient à deux armateurs marseillais pour tenter l’aventure maritime. Ils fondent ainsi la compagnie qui deviendra la Compagnie des Messageries Maritimes.
En 1855, les frères Pereire, investissent dans le crédit immobilier et le chemin de fer, créent la Compagnie Générale Maritime pour se lancer dans le transport maritime. Le 14 avril 1862, le premier paquebot de ce qui est devenu la Compagnie Générale Transatlantique quitte Saint-Nazaire pour se diriger vers les Antilles et le Mexique. Le 15 juin 1864, le paquebot Washington relie le Havre à New-York, inaugurant la ligne reine de la compagnie pour plus d’un siècle.

1919-1929 : le paquebot, un objet moderne
Les États-Unis ayant fermé leurs frontières à l'immigration, les compagnies maritimes doivent changer de modèle économique. Leur but : conquérir des élites pour leurs premières classes, ainsi qu'une nouvelle clientèle appelée « touriste », principalement américaine et aux budgets plus limités, qui aspire à découvrir l'Europe. Les compagnies multiplient aussi les croisières et inventent les voyages à thèmes croisières en Méditerranée pour les Messageries et circuits au Maroc et en Algérie pour la Transat. Le décor « égyptisant » de Champollion et de Mariette Pacha plonge dès l'embarquement les passagers dans le dépaysement.
En 1924, la Compagnie Générale Transatlantique peaufine Ile-de-France qui est mis en service sur la ligne Le Havre-New-York en 1927. Le président de la compagnie, John Dal Piaz, impulse l'abandon des décors traditionnels pour un style résolument moderne, créé par les plus grands artistes révélés par l'Exposition Internationale des Arts Décoratifs de 1925. Le succès est immédiat.

1930-1974 : les géants des mers

Anonyme, Paquebot Normandie Cie Gle Transatlantique à New York, entre 1935 et 1942. Photographie © Collection French Lines
Sous la pression du gouvernement français et malgré la crise économique mondiale, la Compagnie Générale Transatlantique lance en 1930 la construction d'un paquebot de plus de 300 m pour la ligne de New-York. Le projet « T6 », baptisé Normandie, met presque la compagnie en faillite. L'Etat doit soutenir le projet, garantir les emprunts et rentrer dans le capital de la Transat qui se transforme en Société d'Économie Mixte.
Normandie devient un projet identitaire qui incarne la nation. Toutes les capacités d'innovation techniques et industrielles de la France sont réunies dans le seul objectif de réduire la traversée transatlantique à moins de cinq jours : c'est crucial pour la clientèle des affaires et cela permet d'assurer un service transatlantique hebdomadaire avec deux navires. Grâce à sa propulsion turbo-électrique et à sa coque dessinée par Yourkevitch pour fendre les lames, Normandie atteint les 30 nœuds et remporte le Ruban Bleu dès sa traversée inaugurale en mai 1935. Navire légendaire, il reste le plus grand paquebot du monde. Pendant la Seconde Guerre mondiale, les paquebots sont mobilisés.
Beaucoup sont endommagés ou détruits comme Normandie qui, réquisitionné par l'armée américaine, brûle dans le port de New -York en 1942. Le conflit terminé, les compagnies européennes se lancent dans des programmes de reconstruction de leurs flottes marchandes.
Après de longues hésitations, le gouvernement français et la Compagnie Générale Transatlantique décident, en juillet 1956, la construction d'un nouveau grand paquebot rapide dont le chantier démarre l'année suivante. France, mis en service en 1962, est l'héritier de Normandie tout en bénéficiant des innovations de United) States. Chef-d'œuvre d'ingénieur, il est voulu comme le fleuron de l'industrie française des « Trente glorieuses ». La concurrence aérienne signe néanmoins la fin des grands liners. Queen-Mar- est désarmé en 1967, United-States en 1969 et Pasteur, le dernier paquebot des Messageries en 1972. Le choc pétrolier de 1973 a raison de France, désarmé en 1974.

L'invitation au voyage : l'affiche de paquebots

Ruedolf, Visitez l'Extrême-Orient par les Messageries Maritimes, Chameaux à l'abreuvoir devant une porte de Pékin, vers 1925. Affiche © Collection French Lines.jpg
De l'Art Nouveau à l'Art Déco, les formes s'épurent et se structurent ; le décoratif cède place au conceptuel. Des artistes renommés comme Cassandre pour Normandie et Paul Colin apposent leur griffe. L'information se sublime en image de marque, l'utilitaire s'auréole de désir. C'est le développement d'une nouvelle conception de l'affiche maritime marquée par deux innovations majeures. La première consiste à remplacer un ensemble (le navire) par une de ses composantes ou de ses qualités : le sillage pour la vitesse, la salle à manger pour le confort, l'ancre pour le mouillage, les bras levés pour l'hospitalité, le mouchoir agité pour le départ.
Deux marqueurs identitaires vont rapidement s'imposer : l'étrave de la proue cadrée en contreplongée qui fend les flots vers sa destination et surtout la cheminée qui témoigne de la puissance, de la vitesse et de la modernité du paquebot.
La seconde substitue la représentation du pays ou de la ville de destination au moyen de transport. Il s'agit en quelque sorte d'une ellipse temporelle. Vous vouliez débarquer à New-York, à Hong-Kong, à Alger. Avant même de partir, vous êtes déjà arrivés.

La vie à bord

Condé, Salle à manger de la 1re classe du paquebot France. Cie Gle Transatlantique, vers 1912. Imprimé © Collection French Lines
À travers la reconstitution d’un pont de bateau, de cabines, la présentation d’objets et de mobilier, la dernière partie de l’exposition propose de revivre l'âge d'or des palais flottants.

Durant les traversées transatlantiques, il est nécessaire d’être inventif et d’éviter la monotonie. En première classe, le petit déjeuner est servi dans les appartements de luxe et les cabines. Un peu plus tôt, des grooms ont distribué l’Atlan6que, le journal imprimé à bord : il contient les nouvelles du monde, ainsi que des renseignements pratiques quant au déroulement de la journée. En milieu de matinée débutent les activités intérieures et extérieures. On peut choisir de s’installer dans le salon d’écriture pour rédiger son courrier avant de l’emporter à l’agent des Postes.

Parade gastronomique sur l’Atlantique : l’âge d’or de la restauration
Modèles dans la gastronomie, le service et les arts de la table, les navires de la French Line ont pleinement participé au rayonnement mondial de la cuisine et du service français. Ainsi, toutes les deux heures s’enchaînent : petit déjeuner, déjeuner, lunch, thé, dîner et service de boissons chaudes en soirée. À peine embarqués, une des priorités pour les voyageurs est de réserver leur table auprès du Maître d’Hôtel Principal, en espérant qu'il les installera au pied de la grande descente. L’accès à la salle à manger s’effectue par un escalier pouvant atteindre une hauteur de plusieurs ponts. Telle une parade sociale, l’entrée des passagers s’accomplit de manière ordonnée, les personnalités et les passagers de marque se présentant à la fin. Composés de plus de 83 plats disponibles à volonté, la carte du paquebot Normandie propose à chaque service des mets plus raffinés les uns que les autres : caviar, langouste Bellevue, turbot sauce Riche ou faisan truffé.
Summum du prestige, le passager ne retrouvera jamais le même plat à la carte durant les 8 jours que pouvait durer la traversée. Avec plus de 344 boissons différentes, 70 000 bouteilles stockées dans la cave du navire, la carte des vins symbolise à elle seule cette démesure de l’excellence. Le champagne, boisson liée aux célébrations, coule à flot et vient marquer l’arrivée à destination.

Renseignements pratiques

Palais Lumière
Quai Albert Besson
74500 Evian
+33 4 50 83 15 90
+33 4 50 83 10 00
www.ville-evian.fr
courrier@ville-evian.fr

Le Palais Lumière est ouvert tous les jours, de 10h à 19h sauf le lundi : 14h -19h).
TARIFS
Plein tarif : 10 €
Tarif réduit, sur présentation de justificatifs : 8 € groupes d’au moins 10 personnes, enfants de 10 à 16 ans, étudiants, demandeurs d’emploi, personnes handicapées, familles nombreuses, titulaires de la carte loisirs C.E., C.N.A.S., cartes M’ra, hôtels et résidences tourisme partenaires).
Le billet d’entrée donne droit à une réduction de 30 % sur les prix d’entrée des expositions en cours à la fondation Pierre Gianadda à Martigny


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Pierre Aimar
Mis en ligne le Samedi 16 Mars 2013 à 17:33 | Lu 1784 fois
Pierre Aimar
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