Charles Ratton, l’invention des arts « primitifs », musée du quai Branly, Paris, du 25 juin au 22 septembre 2013

Expert, marchand, collectionneur, Charles Ratton (1897-1986) marqua profondément l’histoire du goût et participa grandement à la notoriété des arts « primitifs » dans le monde. Le musée du quai Branly lui consacre sa première exposition et revient sur le parcours de cette figure historique du marché de l’art, grand promoteur des arts premiers, dont l’activité et la passion ont participé à l’avènement des objets « primitifs » au rang d’œuvres d’art.


Sa sensibilité et son érudition, forgées par son activité de marchand d’objets « Hautes époques » (Moyen Age et Renaissance), ont conduit Charles Ratton à s’intéresser aux arts de cour d’Afrique - Danhomè, Ashanti, Grassfields - puis aux objets anciens d’Océanie et d’Amérique ou encore aux objets, atypiques pour l’époque, d’arts eskimo.
Plus de 200 oeuvres (d’arts premiers, anciens, asiatiques mais aussi d’avant-garde) et documents d’époque retracent le parcours en France et aux Etats-Unis de ce marchand à l’enthousiasme militant et évoquent ses amitiés avec les artistes surréalistes André Breton, Paul Eluard, ses collaborations photographiques avec Man Ray, son rôle majeur au côté de Jean Dubuffet dans la définition de l’art brut et ses liens avec les grands collectionneurs de son temps.

« Les arts méconnus, c’est-à-dire ceux de l’Amérique précolombienne, de l’Afrique et de l’Océanie, commencèrent à l’intéresser vivement. Il se rendit compte que ces arts que l’on appelle improprement « primitifs » obéissent aux mêmes lois et sont dignes de la même estime que les arts classiques et que ceux de l’Asie, ces derniers n’étant eux-mêmes guère connus et appréciés que depuis une quarantaine d’années. Il décida de s’y consacrer entièrement. »
Charles Ratton à propos de lui-même

L’univers de Charles Ratton, entre curiosité et érudition

Vue générale de l’Exposition ethnographie des colonies françaises musée d’Ethnographie du Trocadéro, 1931
Originaire de Mâcon, Charles Ratton vient suivre à Paris les cours de l’Ecole du Louvre avant que la Première Guerre mondiale n’interrompe pendant quatre ans ses études. Charles Ratton s’intéresse d’abord au Moyen Age et, plus largement, à ce que l’on nomme alors les « Hautes époques ». Conduit vers l’Afrique par des rencontres et la « mode nègre » lancée par les cubistes, il élargit dès les années 1920 sa curiosité aux Amériques et à l’Océanie.
Le premier espace de l’exposition, conçu comme un cabinet de curiosités, restitue le bureau de Charles Ratton avec les oeuvres et le mobilier toujours conservés dans la collection Ladrière. Cette reconstitution présente également des photographies de Charles Ratton, de sa famille ou de ses amis ainsi que ses notes et croquis qui témoignent de sa méthode de travail extrêmement précise. Cette introduction est aussi l’occasion de revenir sur la situation des arts « nègres » vers 1920, les rôles joués par Guillaume Apollinaire, Paul Guillaume, les artistes André Derain, Georges Braque, etc. et sur les liens qui unissaient Charles Ratton au surréalisme dans les années 1920. Un ensemble d’oeuvres de diverses époques – Antiquité, Moyen Age – et provenances – Extrême- Orient, Afrique, Océanie et Amériques - témoignent de sa curiosité et de son érudition.

Le marchand des surréalistes et l’activité avec les Etats-Unis
Établi au 76 rue de Rennes, au 39 rue Laffitte ensuite, et, de la fin des années 1920 à sa mort, au 14 rue de Marignan, Charles Ratton reçoit l’autorisation d’exercer le métier de « brocanteur à demeure » le 19 mars 1927. Il agit également comme expert à l’Hôtel Drouot à partir de 1931. Il s’y distingue très vite par son incessante activité de défenseur – de propagandiste même – des arts dits alors « primitifs » d’Afrique, d’Asie, des Amériques et d’Océanie.
Il s’impose comme le connaisseur érudit de cultures méprisées et mal connues en créant la figure du marchand érudit. Il développe ainsi un réseau d’acheteurs et de prêteurs dans lequel les grands amateurs fortunés côtoient artistes d’avant-garde et poètes surréalistes désargentés. Charles Ratton comprend très vite qu’il faut être international, qu’il doit s’implanter aux Etats- Unis et s’appuyer sur tous les moyens de communication modernes, presse, photographie et cinéma.
L’exposition s’articule autour des nombreuses expositions et ventes auxquelles il a participé.

Informations pratiques

Musée du quai Branly
37 Quai Branly
75007 Paris, France
01 56 61 70 00

Catalogue de l’exposition : Coédition musée du quai Branly / Skira Flammarion - 192 pages - 150 illustrations - 35 €



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Pierre Aimar
Mis en ligne le Jeudi 21 Mars 2013 à 13:00 | Lu 824 fois
Pierre Aimar
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