Cenerentola de Rossini au Théâtre des Champs Elysées, le 3 février à Paris, par Michel Finck

C'est dans un autre très beau temple de la musique à Paris que nous assistons à cette œuvre du Maître de Pesaro. Il y a un paradoxe dans le monde de la musique actuel : il est du dernier bien de jouer sur des instruments d'époque les œuvres du 19° siècle, nous infligeant parfois des sons un peu grinçants ou aigrelets, ...


Que dirait le public si on montrait la Joconde avec des moustaches ?

... et par contre il ne faut surtout pas jouer les ouvrages dans des mises en scène représentant de façon traditionnelles les opéras. Je me suis toujours demandé ce que dirait le public si on montrait la Joconde avec des moustaches ?

Et bien, lorsque l'orchestre a la virtuosité de Concerto Köln dirigé par Michael Güttler jeune chef précis, alerte et vif, on en redemande. Quant à la mise en scène très déjantée de Irina Brook et qui n'a plus grand chose à voir avec l'histoire d'origine, elle trouve parfaitement sa place dans l'opéra dont le chant et la musique sont parfaitement respectés et nous fait passer une soirée à toute vitesse tant les rires sont fréquents. Il faudrait citer de multiples moments mais c'est surtout la direction d'acteurs qui est époustouflante. Ils sont tous parfaits et se bougent avec précision jusqu'à l'excellent chœur d'hommes qui effectue un véritable travail de ballet.
Vivica Genaux est une très jolie cantatrice dotée d'une grande voix au grave naturel de contralto avec un médium et des aigus puissants, des vocalises étourdissantes. Dans le décor du premier acte ressemblant au café de César on s'attendrait à ce qu'elle chante " moi j'essuie les verres..." mais c'est bien l'air d'Angeline qu'on entend, par contre quand entre Don Magnifico réveillé par ses filles toutes deux excellentes, c'est le dit César qu'on croit voir surgir. Pietro Spagnoli possède une belle voix de baryton large mais souple vocalisant à souhait.
Arrive ensuite Dandini en rocker qui s'est tellement dépêché à quitter sa tenue de secrétaire qu'il a oublié d'enlever l'étiquette de sa veste: superbe Stéphane Degout, lui aussi doté de la belle voix de baryton que l'on connait bien. Ce qu'on ne connaissait pas s'est sa capacité a jouer les comiques avec autant de facilité. C'est également le cas d'Ildebrando d'Arcangelo qu'on a plus l'habitude de voir dans des emplois sérieux et qui ici révèle des qualités de comique désopilant. Il est le mendiant rejeté par les sœurs et aidé par Angeline mais il devient l'envoyé du ciel qui décide de tout ce qui se passe ensuite dans l'histoire remplaçant la bonne fée de Perrault. Dans son appartement ultra moderne la vedette du show biz ( le prince ) reçoit le rapport de son secrétaire. Antonino Siragusa, ténor à la voix dotée d'aigus et suraigus d'une puissance extraordinaires malgré un timbre un peu ingrat et qui avec sa calvitie et les grosses lunettes de son secrétaire ressemble à s'y méprendre à Jean Pierre Koffe. A L'évocation d'Alidoro dans le texte bien suivi par Brook, celui ci traverse l'espace d'un blanc immaculé sur une trottinette ailée, plusieurs fois, dans un grand silence comme s'il volait, sans gêner le duo très orné en vocalises des deux compères, pour aller s'écraser en coulisse dans un grand fracas et reparaître tout bancal sur scène.
Dernier grand moment de cet opéra, l'air tant attendu d'Angeline. Celle-ci devenue grande vedette dans une splendide robe rouge égrène de très belles vocalises pendant que le choeur en costumes modernes danse de façon un peu irrévérencieuse mais fort drôle.
Une excellente soirée qui risque de nous faire paraître fades les représentations traditionnelles! Comme quoi!? il ne faut jamais dire...
Michel Finck
mcfinck@yahoo.fr

pierre aimar
Mis en ligne le Mercredi 10 Février 2010 à 13:26 | Lu 1319 fois
pierre aimar
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