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Une inoubliable Lakmé à l’Opéra de Toulon ! Par Serge Alexandre

Depuis l’arrivée de Claude-Henri Bonnet, un vent de nouveautés et de qualité souffle dans les voiles du beau vaisseau varois. Après Lausanne, l’opéra-Comique, Saint-Etienne, c’est la belle production confiée à Lilo Baur qui faisait revivre le chef d’œuvre lyrique de Léo Delibes sur un livret d’Edmond Gondinet librement inspiré de Pierre Loti et de Théodore Pavie créé en 1883 à l’Opéra-Comique à Paris que l’on a pu découvrir à Toulon.


© Frédéric Stephan
© Frédéric Stephan
Un opéra à succès
Lakmé, œuvre à succès s’inscrit dans l’air du temps à sa création où la musique française semble parcourue par un goût prononcé pour l’orientalisme : en témoignent les ouvrages de Félicien David, Camille Saint-Saëns, Georges Bizet, Meyerbeer… Léo Delibes y laisse une musique délicate et inspirée toujours inventive sur le plan harmonique riche en mélodies parmi les plus belles de tout le répertoire de la fin du XIXème siècle. Cela a sans doute garanti son succès toujours actuel sur les grandes scènes françaises et à l’étranger.

L’histoire relate une grande histoire d’amour impossible entre Lakmé, fille du Brahmane Nilakantha au statut de déesse vivante à un jeune officier anglais Gérald. Deux religions, deux cultures, deux milieux sociaux les séparent radicalement… Il y a dans le livret de Lakmé un je-ne-sais-quoi d’un Roméo et Juliette qui se passerait dans une Inde coloniale sur fond de critique du colonialisme anglais.

Une mise en scène réussie
Respectueuse du livret à la lettre, Lilo Baur offre une représentation de l’Inde épurée et esthétique ayant pour cadre intemporel conflits religieux et culturels. Pour cela, elle s’appuie sur d’intelligents et beaux décors de Caroline Ginet et des costumes au caractère intemporel de la suédoise Hanna Sjödin bien mis en lumières par Gilles Gentner offrant au premier acte une grande motte de terre, une immense et superbe structure tubulaire dorée au deuxième acte évoquant un temple, un enchevêtrement de lianes comme le miroir d’une jungle indienne étouffante et mystérieuse au troisième illustrent un propos. Sur ce canevas, les différents protagonistes, chœurs et figurants de l’ouvrage semblent dirigés avec justesse magnifiant le drame. Lilo Baur et son équipe signe là l’une des plus belles réalisations scéniques de Lakmé évitant tous les poncifs insupportables et kitsch de nombre de ses confrères et consœurs la précédant. Soulignons la chorégraphie sobre, moderne et réussie des trois vestales à l’acte II d’Olia Lydaki.

Superlatifs de rigueur pour une distribution mémorable
Dans la fosse, Giuliano Carella offre une direction musicale alerte, souple et inspirée de l’ouvrage toujours soucieuse des chanteurs. L’équilibre fosse et plateau est réussi.
Toutes les qualités d’une partition colorée sont ici transcendées. L’orchestre et les chœurs apparaissent sous leur meilleur jour.
L’ensemble de la jeune distribution française réunie ici est homogène, jeune à la diction irréprochable. Comme quoi l’école de chant française a encore de beaux jours devant elle, n’en déplaisent à certains !
Après avoir triomphé à l’Opéra comique presque vingt ans après Nathalie Dessay, la jeune soprano Sabine Devieilhe est assurément une grande Lakmé tant vocalement que scéniquement. Elle possède une technique consommée lui permettant de s’affranchir de toutes les difficultés de l’ouvrage. Sa voix de soprano léger et colorature fragile à souhait scie parfaitement au profil requis pour incarner l’héroïne. Elle offre à son incarnation des nuances infimes. Son air des clochettes et l’intensité dramatique dans son chant au finale en font déjà une interprète idéale.
À ses côtés, Jean-François Borras est un Gérald gauche scéniquement. Il compense par un chant généreux mettant en lumières une belle voix de ténor au timbre doré s’exprimant pleinement dans l’acte trois après des débuts précaires dans Fantaisie aux divins mensonges au premier acte.
Marc Barrard campe un Nilakantha de classe internationale à la fois imposant et émouvant, notamment dans ses stances. Quelle belle santé vocale chez cet artiste de tout premier plan ! Son aigu n’est jamais mis à l’épreuve ici.
Christophe Gay est un superbe Frédérick à la justesse imparable.
Aurore Ugolin au mezzo délicieux est une Malika rêvée. Son duo avec Lakmé au premier acte est un pur ravissement.
Cécile Galois, Jennifer Michel et Élodie Kimmel sont irréprochables dans leur rôle respectif tandis que le ténor Loïc Félix tire son épingle du jeu en incarnant Hadji.
L’accueil triomphal du public totalement mérité fait de cette Lakmé, l’une des grandes réussites lyriques du sol français en ce début de saison. On en redemande !
Serge Alexandre

Lakmé a été représentée les 10, 12, 14 octobre 2014
Prochain opéra à ne pas rater Anna Bolena de Donizetti les 14, 16 et 18 novembre sous la direction musicale de Giuliano Carella.
Avec Ermonela Jaho et Kate Aldrich…
www.operadetoulon.fr
Réservations : 04 94 92 70 78.

Pierre Aimar
Mis en ligne le Mercredi 15 Octobre 2014 à 03:26 | Lu 687 fois

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